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c'est du tout venant
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21 mai 2008

La Foulerie

Le chef-lieu de canton a, pour son prestige et le bien-être de ses habitants,  une équipe d'ouvriers communaux.
Ils entretiennent les espaces verts, veillent au bon fonctionnement des équipements municipaux et travaillent sous la houlette du beau Joël.
Joël, c'est le chef et il est beau.
Grand, charpenté, alerte, il fait rêver. Bien que frisant la cinquantaine,  il garde une chevelure léonine et son visage hâlé est éclairé par des yeux très clairs et un rien rieurs. Et puis il est aimable, un petit signe amical au volant de sa fourgonnette quand il croise un de ses concitoyens, une parole courtoise, la binette à la main  devant les massifs fleuris. Qui ne l'a jamais vu conduire la tondeuse sur la place de la Foulerie, un casque anti-bruit sur les oreilles, dans la claire lumière des jours de printemps, ne sait pas qu'en ces lieux  se trouve une icône de la virilité.

Je l'avoue,le grand Clint a bercé beaucoup de mes nuits, mais Joël est plus vivant, un peu moins vieux aussi. Quand on en parle, les yeux des femmes s'allument, les hommes rient jaune en disant que tout ça, c'est que de la façade, que ce type-là est trop beau pour être honnête.
On en rigole entre copines, sachant très bien que ce ne sont que fadaises.
Pourtant j'en connais une qui longtemps, a caressé de beaux rêves. C'était il y a vingt ans et j'habitais une de ces maisons de poupée qui font face à l'école, à la Foulerie.
Je pouvais voir Marie-Christine traverser la place d'un pas décidé.
De toute façon, pas moyen de la rater, courte vêtue, de couleurs vives, à quarante ans, elle s'habillait comme une midinette aguicheuse, les jambes à l'air, le décolleté accrocheur et le maquillage outrancier. Elle était précédée d'effluves de Poison et d'un parfum de scandale qui faisait chuchoter son passage. Elle avait, un temps, jeté son dévolu sur un lycéen de dix-sept ans, au grand dam des parents, et s'était promenée avec lui main dans la main  dans l'allée Saint Nicolas. Puis elle avait semé le trouble chez un jeune couple, en allant chercher le mari à la barbe de la jeune et jolie épouse toute démunie.
Enfin, lassée de ces victoires faciles, Marie-Christine décida d'accrocher le beau Joël, qui n'était pas encore chef mais déjà très beau, à son tableau de chasse. Elle se passionna bientôt pour le jardinage, ne ratant jamais l'occasion  de demander un conseil d'horticulture au jardinier municipal.
A cette époque, les paris allaient bon train au bar du commerce pour savoir qui de la Marie-Christine ou du beau Joël gagnerait dans le jeu  qui s'était engagé.
Bernadette, la femme de Joël, voyait impuissante sa rivale lancer ses rets et dépérissait à l'idée de savoir son mari réduit au rang de gibier. Les caissières de la supérette soupiraient car partout on parlait de la dernière lubie de Marie-Christine ; tout le village attendait en frémissant, car plus personne ne doutait de la victoire de la pècheresse, la chute du beau Joël. 

Il ne départit pas de sa gentillesse  et répondit à toutes les questions avec précision et un peu de moquerie. Cependant, il refusa d'aller chez elle lui montrer comment tailler ses rosiers.

Depuis, avec les copines, on sait qu'on peut rêver sans crainte.

 

 

 

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Commentaires
B
Muvapa > La morale est sauve.... Ouf, on a eu chaud!
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M
bien fait pour elle! nah!!!
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B
Mère Castor > Non, vous aussi ...?<br /> Merci.
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L
Sinon, vous avez bien fait d'ouvrir un blog, ça devait être dit.
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L
Excellent le fantasme du beau jardinier, ça a un petit côté jardin d'Eden, courons nus dans la rosée et toutes ces choses.
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