Au bûcher !
J'ai appris des choses sur ma famille pendant le réveillon. J'ai appris que mon trisaïeul, le père de mon arrière grand-mère, c'est bien mon trisaïeul, il s'appelait Siméon, était rebouteux-guérisseur en Normandie, Haute Normandie. Il soignait par des passes de mains, des prières et des plantes. Je savais que mon arrière grand-mère, ma bisaïeule, était un peu sorcière. Mais j'avais fini par penser que c'était une légende familiale de plus. Entre la cantinière russe et la grand-mère sorcière, on ne sait plus que croire dans cette famille. Mais j'ai connu Mémé. Elle soignait, elle aussi. Les gens du village venaient la consulter. Ma mère se souvient de l'avoir vue recevoir des patients devant lesquels elle marmonnait en faisant des gestes. Elle connaissait les herbes. Ce qu'a dit ma mère l'autre soir, c'est que c'est ma grand-mère qui a mis fin à toutes ces pratiques quand trop âgée pour vivre seule, Mémé est venue s'installer chez elle. Ma grand-mère Tatine et son mari étaient employés de maison chez le médecin du village. Tatine avait soif de respectabilité et ça la foutait mal, en travaillant chez le toubib, de loger chez elle sa mère guérisseuse. Le savoir s'est perdu. Maman se rappelle d'un carnet noir où sa grand-mère avait noté ses recettes. Ma mère est cartésienne mais elle regrette que Tatine ait interdit jusqu'à la connaissance des plantes.
Moi je regrette tout. Je me serais bien vue sorcière. Gentille sorcière. Ne préparez pas les fagots.