Edmond et les fleurs
Ce n'est pas pour me vanter mais, moi, oui Monsieur, oui Madame, moi-même personnellement, j'ai des orchidées dans mon jardin. Parfaitement. Une espèce rare et protégée que je cultive pleine terre. L'année dernière, j'en avais vu un pied, et déjà, je n'étais pas peu fière. (Et je lui donnais alors un autre nom. Faut pas s'en formaliser, souvent femme varie.) Mais cette année, mes amis, cette année, il y en a cinq pieds. Cinq. J'avais surveillé l'endroit où il y en avait l'an dernier, en veillant bien à ne pas tout couper d'un coup de tondeuse intempestif. J'en avais repéré deux. Et ce soir, quelle ne fut pas ma surprise en en découvrant trois autres ailleurs. Je les regarde, je les admire. Et comme je suis partageuse, je vous les montre. Par un fait extraordinaire, tous les pieds ne sont pas au même degré d'avancement. Alors, voyez l'évolution de l'Ophrys fuciflora .
Certains en sont encore à se faire désirer.
Quand d'autres peaufinent leur éclosion.
J'ai aussi, bien sûr, comme le commun des mortels, des pivoines, du seringat et des roses. Mais je ne les montre pas ce soir.
Ce soir, c'est ravioli, non poésie:
En croyant à des fleurs, souvent on les fait naître.
Edmond Rostand